La Maison Vallot, camp de base de l'association A Chacun Son Everest à Chamonix

Au cœur de la Maison À Chacun son Everest !

Christine Janin a fondé l'association À Chacun son Everest ! à Chamonix, dans une maison dédiée aux femmes et aux enfants en rémission du cancer. Elle y propose des séjours de guérison pour redonner confiance et énergie.

Face à un lieu qui bouleverse et une femme qui inspire, est-ce si simple pour le duo que nous formons avec Margot de tenir notre angle ? À Chamonix, Christine Janin, première française au sommet de l’Everest, a bâti le camp de base de l'association À Chacun son Everest !, dans un refuge pas comme les autres où femmes et enfants apprennent à redescendre de leur sommet – le cancer. Visite guidée du 703 Rue Joseph Vallot avec Christine Janin.

Maison Vallot

L'ombre des épicéas enveloppe cette maison centenaire construite à deux pas du centre ville direction les Praz par Joseph Vallot au début du XXème siècle. Astronome, naturaliste, géographe et alpiniste, son nom résonne aux quatre coins de la vallée de Chamonix. Il fit bâtir cette maison d'inspiration bourgeoise aux murs épais et aux volets colorés rappelant celles présentes mais dissimulées du golfe du Morbihan. L'immense parc de 6 000 m2 est d'un calme reposant. Margot qui vient d’un pays du Sud où le cagnard cogne, observe le ciel méditerranéen et la lumière rasante avec curiosité.

Parc de la Maison A Chacun Son Everest, 703 Rue Joseph Vallot à Chamonix

Depuis le parking en contre-bas, direction le camp de base. La marche est courte à peine quelques pas. Notre approche est lente. On respire mal. Aujourd'hui, l'air est pollué y compris à 1100 mètres d'altitude. Comme si nous progressions à des hauteurs où l'oxygène se fait rare. On prend alors pied sur le perron. Combien de groupes se sont faits et défaits à côté de ce grand drapeau népalais planté face à la porte d'entrée ?

Pousser la porte de la maison À Chacun son Everest !, c'est en fait pénétrer pour quelques mois encore chez Christine Janin. Le 703 Rue Joseph Vallot est sa maison. Alors que la succession à la tête de l'association est en cours, elle a décidé progressivement de passer la main, c'est ici qu'elle nous accueille le sourire franc et le regard vif. Ici qu'elle a accueilli ces 12 femmes arrivées la veille et près de 2300 femmes et 5 000 enfants supplémentaires depuis 1994. Sans oublier tous ceux qui passent la saluer, s'investissent bénévolement dans l'encadrement des séjours. "Ils font tous partie de sa famille" dit-elle en rajoutant ses partenaires dont l'énumération pourrait tapisser les murs de la maison.

Maison d'hôtes

Une poignée de main et la rencontre est lancée. Christine Janin nous reçoit, visage lumineux ornée d'un collier à trois pierres, accompagnée d'une jeune stagiaire. Volubile, elle l'est aussi dans ses gestes. Nous ne sommes que quatre assis autour de la petite table basse mais la conversation semble être collective. Tous les visages encadrés aux murs nous observent. Notre hôte pourrait livrer une anecdote sur chacun. Y compris lorsqu'elle pioche parmi les albums celui de Bikram Solidarité Népal, l'autre association dont elle est à l'origine qui vient en aide financièrement aux familles et orphelins suite au tremblement de terre de 2015.

Si l'icône Christine est habitée par sa mission, sa maison l'est aussi. "Chaque semaine, c'est le meilleur groupe" nous dit-elle d'emblée. Entre ces murs, elle déploie "sa petite recette" principalement pour les femmes en rémission du cancer. "Cette maison d'hôtes est une maison d'amour, de cocooning. Une maison rien que pour elles". Chaque mur est orné d'attentions, de mots doux ou de témoignages. Il y a autant de cœurs dessinés, sculptés ou encadrés que de drapeaux népalais et de sel rose de l'Himalaya disposés çà et là.

Christine Janin en dehors de son Everest, on en parle peu. Elle inspire les autres, mais qui l'inspire, elle ? Au même moment, ou presque, Violette Dorange boucle son premier Vendée Globe à 24 ans. La ressemblance entre l'aventurière et la navigatrice est frappante : toutes les deux autour et sur le toit du monde au même âge. Inoxtag participe aussi à notre conversation. Elle salue l'énergie du jeune homme. Mais constate avec tristesse que l'Everest d'aujourd'hui n'a plus rien à voir avec celui du 5 octobre 1990. "Je ne recommande à personne d'y aller". À l'époque, elle et son compagnon de cordée le photographe Pascal Tournaire sont seuls au sommet. Les photos historiques prises sous le ressaut Hillary, cent mètres à peine du sommet, trônent en bonne place dans le salon.

La visite continue vers la pièce commune. Elle saisit les paperboards aux métaphores percutantes montrées la veille aux participantes du séjour. Les mots en P – partage, passion, peur, plaisir – illustrent sa métaphore de l’ascension et de la redescente. Christine transmet un seul objectif : insuffler "l’en-vie" de redescendre pour "gai-rire".

La parole se libère entre femmes au cœur du petit salon attenant aux allures de cocon familial. Les mouchoirs sont à portée de main pour sécher les larmes. Confidences et émotions partagées se tissent dans l'intimité des vécus racontés.

Salon cosy de la maison A Chacun Son Everest

Un peu plus tôt, en traversant le sas d’entrée, notre regard a instinctivement glissé sur le grand miroir, comme pour esquiver notre propre reflet. Accepter son image est pourtant l'un des fils conducteurs des séjours où les femmes alternent les activités extérieures (yoga, randonnée, escalade, thermes, etc) sous l'œil de photographes qui immortalise la beauté. À leur retour, les maquilleuses, psychologues, énergéticiennes ou encore masseuses prennent soin des corps et de l'intérieur.

Maison forte

Dans les couloirs, de grandes photos témoignent des travaux titanesques entrepris en 2001. Avec l'énergie de ses 20 ans, Christine nous partage quelques anecdotes des épreuves traversées, comme ce million de francs manquant pour réhabiliter la maison acquise à la commune de Chamonix. Un pas devant l'autre, on passe devant d'autres attentions écrites. Même le simple fait d'allumer la lumière est un geste éclairé.

Attentions écrites de participants aux séjours d'A Chacun Son Everest

L'immensité de la maison déroute notre sens de l'orientation. Les escaliers ont des volumes de châtelains et des ouvertures lumineuses. Les chambres ont des hauteurs sous plafond haussmanniennes. Impossible de compter les pièces zen, les salles de rangements ou le matériel stocké au sous-sol, un magasin complet, pour équiper de la tête aux pieds les enfants et les femmes.

Christine nous guide. On grimpe. A peine le temps de s'acclimater qu'on redescend. Elle nous évite peut-être le mal aigu des montagnes qui foudroie ceux qui montent trop vite. Puis elle nous ouvre les portes de la grande salle en bois entièrement dédiée au travail énergétique. L'alignement des bols tibétains coïncide avec les sommets en arrière plan. La vue dégagée sur les aiguilles du Grépon et de Blaitière est saisissante. C'est ici que les femmes puisent l'énergie vitale.

Quant à l'immense salle d'escalade, construite ex nihilo à l'arrière de la maison, on ne peut que mesurer la chance qu'ont les participantes d'avoir accès à cet espace unique où les voies ne dépassent pas 5 de cotation maximale. Loin de la performance, elles travaillent le lâcher prise et la confiance en soi. Christine enfile elle aussi son baudrier chaque semaine. Remonte aux Posettes ou au Prarion et raconte, encore et encore, qu’il faut savoir aimer la vie.

Portrait de Christine Janin dans sa Maison A Chacun Son Everest, à Chamonix

Depuis 30 années ininterrompues d'écoute et d'accompagnement, elle et son équipe accueillent les êtres et leurs émotions à l'ultime croisement du chemin de la guérison, c'est-à-dire celui, tout aussi éprouvant, de l'acceptation. Christine donne tout, toutes les semaines, à toutes ces femmes et ces enfants. Elle nous a donné son temps. Ses récits en cadeau. Et son oxygène pour redescendre. Quelque chose a changé. On repart différents, apaisés mais abasourdis par l'énergie du 703 Rue Vallot à Chamonix où l'amour est roi. Et Christine la reine.

Margot et Tim


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