L'accueil SNCF c'était avant. Avant que le bâtiment ne soit abandonné pendant vingt ans, racheté puis rénové par la propriétaire et patronne des lieux, Stéphanie Mazuer, une femme attachante qui nous reçoit dans son Café de la Gare qu'elle a ouvert au rez-de-chaussée de la charmante halte ferroviaire des Bossons. Le bâtiment reconnaissable à son crépit rose commun aux haltes ferroviaires du Pays du Mont-Blanc entame une nouvelle vie : celle d'un café "source de convivialité" aussi réconfortant que nos journées d'avril sont désopilantes, tantôt estivales un jour, hivernales le lendemain. À l'écart de l'agitation chamoniarde parfois excessive, Stéphanie Mazuer a ouvert ce petit café comme on n'en voit plus, et disons-le, comme on les aime : chez elle, aménagé avec soin pour ses amis, ses voisins et les gens du quartier à proximité. On s'y attable sereinement. Le café coule, servi dans de délicates tasses en porcelaine. A l'intérieur de l'ancienne salle des voyageurs, on est immédiatement absorbé par l'aménagement aux accents historiques. Et pour cause, Stéphanie Mazuer qui auparavant s'occupait des collections du Musée Alpin de Chamonix, a décoré l'espace avec soin : du mobilier chiné dont elle connait chaque histoire, des objets agricoles donnés par les copains et bien sûr du matériel ferroviaire d'époque délicatement posés ci et là. Certains sont détournés comme les abat-jour au plafond ou les deux tables de bergers sous la cimaise centrale. On y trouve aussi un lot de jeux de société, une épicerie de dépannage, des grandes tablées rondes et ce large comptoir en bois propice à la discussion sur lequel trône d'attirantes pâtisseries maisons, le "meilleur croissant de la vallée", [NDLR : ceux du jeune boulanger Romain Bourdillat] et surtout, le sourire amusé de la patronne qui ne boude ni son plaisir de voir ce bâtiment historique revivre, ni celui de répondre avec une hésitation attachante aux doutes de ses clients sur l'addition elle aussi attachante. "C'est le début et je m'adapterai" dit-elle d'un ton jovial, entre deux salutations à ses clients qui vont et viennent dans l'agréable salle baignée de lumière où on y passerait volontiers une pleine journée. "Je voulais créer du lien entre les habitants et faire naître de jolies rencontres. Ce lieu en écho avec ce que je suis et ce que j'aime me le permet" explique Stéphanie Mazuer. Dans ce quartier à l'entrée de Chamonix où les commerces de proximité ont disparu et où la tension immobilière occupe autant l'espace que les discussions, réouvrir ce lieu à taille humaine est donc autant une entreprise individuelle qu'un projet social de proximité assumé par la patronne. Chose faite. Les voisins et les amis, des anglais bien sûr, quelques têtes connues et déjà des premiers habitués viennent y faire un coucou, déjeuner en terrasse les lundis, jeudis et vendredis pour apprécier la vue sur le glacier des Bossons et les géants du Mont-Blanc ou s'assoir dans un confortable fauteuil à la reine devant les motrices rouges et blanches du Mont Blanc Express. "Si ce café pouvait insuffler d'autres projets similaires autour des circuits courts et de la proximité, je serai contente" admet Stéphanie Mazuer qui en plus d'écrire une nouvelle page de l'histoire de la Gare des Bossons assure avec entrain les connexions.